Un savoir sombre. On n'a pas cessé, depuis qu'on lit Sade, de dire combien un tel savoir est sombre. Il l'est en effet. Nul n'a, depuis Sade, dans la...
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Un savoir sombre. On n'a pas cessé, depuis qu'on lit Sade, de dire combien un tel savoir est sombre. Il l'est en effet. Nul n'a, depuis Sade, dans la littérature, dit sur l'homme des choses qui le condamnaient à ce point. La condamnation de Sade est, à très peu près, aussi grande que l'était la consolation de Dieu. Pourtant, ce que dit Sade n'a pas cette intention. L'intention de Sade n'est ni de condamner ni de sauver. Elle est que l'homme sache, qu'il connaisse. Ce qu'il n'avait pas pu jusqu'alors. Sade est le premier, dans la littérature, dont la littérature s'exempte de tout jugement (et ce n'est que cela qui scandalise) : bien sûr il offre à qui s'oppose à lui tous les arguments pour l'accuser (de même que lui ne manque pas d'arguments pour s'opposer à qui il accuse). Mais, en même temps, toute cette œuvre se porte au-delà de tout jugement. Qui jugerait Sade se jugerait lui-même. Parce que Sade est simplement cela que chacun est tenu de savoir de la part que lui-même prend à une horreur pour laquelle il n'existe aucune absolution, selon aucun ordre du jugement, passé ni à venir.