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Le clergé chrétien s'est essentiellement attaché à organiser la
dévotion à saint Jean autour de son rôle de baptiste, qui
l'établit comme Précurseur du Christ. Mais Jean ne s'est pas
contenté de venir en Précurseur pour prêcher la pénitence aux
hommes ; il a aussi connu une mort, interprétée par les
chrétiens comme un martyre. Loin que l'histoire se close ici, la
tradition populaire, une fois le récit de la décapitation de Jean
fixé par les évangiles, a utilisé ce thème comme support de
nombreuses croyances, légendes et cultes qui ont su lui prêter,
en retour, une ampleur nouvelle au moyen d'une véritable
exégèse populaire qui peut s'observer jusque dans les
représentations sacrées.
Ce sont quelques-unes de ces
traditions, forgées en marge du récit évangélique, que
Claudine Gauthier analyse dans cet ouvrage, en les
envisageant au regard du complexe mythologique et culturel
qui les sous-tend et dont elles ont transformé le sens. Car,
comme le dit Michel Tardieu dans sa préface : "II y a plus d'un
mort dans la mort de Jean-Baptiste." Mais toutes les traditions
ethnographiques relatives à saint Jean décollé ne peuvent se
résumer ainsi.
Suivant toujours le fil de saint Jean décollé,
Claudine Gauthier montre également que l'hagiographie doit
parfois être lue d'un point de vue différent, en considérant
l'influence du politique sur la construction de certaines vies de
saints. Étudiant le rôle dévolu à l'image du chef de saint Jean
lors de l'accompagnement rituel du condamné à mort par des
confréries de pénitents répandues en Italie et dans la France
méridionale, elle nous permet également de saisir toute la
complexité du concept de "bonne mort" dans le monde
médiévail.