George Orwell avait demandé, sentant la fin de sa vie approcher, qu’aucune biographie retraçant sa vie ne soit écrite. Georges Woodcock, ami intime de l’auteur anglais à partir de 1942, le savait très bien et c’est pourquoi « Orwell à sa guise » n’est pas une biographie à proprement dite mais plutôt une étude critique de l’œuvre d’Orwell mêlée d’éléments biographiques venant enrichir cette étude.
Alors qu’Orwell n’a jamais été autant cité par tous et toutes au sein des milieux intellectuels, politiques et médiatiques, ce livre vient rappeler à tout ce
beau petit monde qu’Orwell n’est pas que l’auteur des seuls Ferme des Animaux et 1984, sommets d’une œuvre entièrement riche, tant dans la forme que dans le fond. Au fil des chapitres, Woodcock analyse chronologiquement les six romans, les trois reportages et les quelques grands essais écrits par Orwell, n’oubliant jamais de mentionner les faiblesses de ces œuvres et rappelant toujours les aspects de la vie et de la personnalité d’Orwell susceptibles d’éclairer ses analyses. De ces dernières, Woodcock dégage, de manière pertinente, ce qui fait la cohérence de l’écrivain et de son œuvre : Orwell est avant tout un moraliste pamphlétaire qui n’a cessé, dans tous ces ouvrages, de traiter de l’aliénation.
Ce portrait littéraire d’un écrivain politique est justement complété dans les derniers chapitres par l’évocation des idées politiques qui animaient Orwell et de l’importance qu’il accordait à la manière de les transmettre. Ici encore, Woodcock souligne ce qui fait l’originalité d’Orwell sur le plan politique, à savoir une position à la fois socialiste (au sens libertaire du terme) et conservatrice dans laquelle on considère que tout progrès technologique et économique n’est pas forcément synonyme de progrès humain et social, ce-dernier étant celui qu’il faut rechercher. Orwell disait vouloir d’ailleurs favoriser une « société libre, égale et décente ». Cela l’inscrit, à mon sens, dans une tradition que l’on pourrait nommer anti-industrielle aux côtés, entre autres, de ses contemporains Simone Weil, Georges Bernanos ou encore Jacques Ellul et Bernard Charbonneau et de ses ancêtres compatriotes William Morris et John Ruskin.
Salutaire à bien des égards, ce livre est une excellente porte d’entrée dans l’œuvre et la vie d’un homme « en quête de la vérité parce qu’il savait qu’elle seule pourrait assurer la survie de la liberté et de la justice », à ranger à côté des excellents essais (réédités aussi en ce mois d’octobre 2020 aux éditions Climats) que lui a consacrés Jean-Claude Michéa.
Pour lire Orwell dans le texte, on préférera, à la récente et prétentieuse édition des œuvres incomplètes d’Orwell en Pléiade, les très beaux ouvrages édités il y a quelques années par les éditions Ivrea (https://www.furet.com/editeur/Ivrea+editions).
Introducing Orwell
George Orwell avait demandé, sentant la fin de sa vie approcher, qu’aucune biographie retraçant sa vie ne soit écrite. Georges Woodcock, ami intime de l’auteur anglais à partir de 1942, le savait très bien et c’est pourquoi « Orwell à sa guise » n’est pas une biographie à proprement dite mais plutôt une étude critique de l’œuvre d’Orwell mêlée d’éléments biographiques venant enrichir cette étude.
Alors qu’Orwell n’a jamais été autant cité par tous et toutes au sein des milieux intellectuels, politiques et médiatiques, ce livre vient rappeler à tout ce beau petit monde qu’Orwell n’est pas que l’auteur des seuls Ferme des Animaux et 1984, sommets d’une œuvre entièrement riche, tant dans la forme que dans le fond. Au fil des chapitres, Woodcock analyse chronologiquement les six romans, les trois reportages et les quelques grands essais écrits par Orwell, n’oubliant jamais de mentionner les faiblesses de ces œuvres et rappelant toujours les aspects de la vie et de la personnalité d’Orwell susceptibles d’éclairer ses analyses. De ces dernières, Woodcock dégage, de manière pertinente, ce qui fait la cohérence de l’écrivain et de son œuvre : Orwell est avant tout un moraliste pamphlétaire qui n’a cessé, dans tous ces ouvrages, de traiter de l’aliénation.
Ce portrait littéraire d’un écrivain politique est justement complété dans les derniers chapitres par l’évocation des idées politiques qui animaient Orwell et de l’importance qu’il accordait à la manière de les transmettre. Ici encore, Woodcock souligne ce qui fait l’originalité d’Orwell sur le plan politique, à savoir une position à la fois socialiste (au sens libertaire du terme) et conservatrice dans laquelle on considère que tout progrès technologique et économique n’est pas forcément synonyme de progrès humain et social, ce-dernier étant celui qu’il faut rechercher. Orwell disait vouloir d’ailleurs favoriser une « société libre, égale et décente ». Cela l’inscrit, à mon sens, dans une tradition que l’on pourrait nommer anti-industrielle aux côtés, entre autres, de ses contemporains Simone Weil, Georges Bernanos ou encore Jacques Ellul et Bernard Charbonneau et de ses ancêtres compatriotes William Morris et John Ruskin.
Salutaire à bien des égards, ce livre est une excellente porte d’entrée dans l’œuvre et la vie d’un homme « en quête de la vérité parce qu’il savait qu’elle seule pourrait assurer la survie de la liberté et de la justice », à ranger à côté des excellents essais (réédités aussi en ce mois d’octobre 2020 aux éditions Climats) que lui a consacrés Jean-Claude Michéa.
Pour lire Orwell dans le texte, on préférera, à la récente et prétentieuse édition des œuvres incomplètes d’Orwell en Pléiade, les très beaux ouvrages édités il y a quelques années par les éditions Ivrea (https://www.furet.com/editeur/Ivrea+editions).