Rue des boutiques obscures

Rue des Boutiques obscures a valu à Patrick Modiano un prix Goncourt à trente trois ans. C'est peut-être son roman le plus accompli, dix ans après de brillants débuts en littérature avec La Place de l'Etoile. Une fois encore, il se montre hanté par le passé, la période de la guerre et de l'occupation. Une amnésique mène une enquête de détective privé sur sa propre identité. Le narrateur qui suit le fil d'Ariane de sa propre histoire est-il bien ce Pedro Mc Evoy, ancien attaché à la Légion dominicaine à Paris et qui est tombé dans les pièges grossiers d'un truand passant clandestinement en Suisse ? Modiano nous propose avec une suprême habileté un jeu constant sur l'opacité des êtres dans la transparence du temps. Pour cela, il sollicite sans relâche l'indifférence têtue des lieux : rues, maisons, jardins, pour qu'ils nous révèlent l'impalpable présence des existences d'autrefois dans l'espace quotidien d'aujourd'hui. Jean-Louis Trintignant nous entraîne irrésistiblement par sa voix -une voix qu'on avait jamais si bien perçue au cinéma -dans cette démarche hallucinatoire, mélange spécifique de réalité et de fiction.