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La présence de Jacques Ancet dans
publie.net va bien au-delà de la simple mise à disposition de
textes importants.
Auteur décisif, nous sommes quelques-uns à le savoir. Le non
renoncement dans la part lyrique de la langue, l'implication
poétique de la prose, ou, symétriquement, que la poésie ait encoreà faire avec nos temps mornes, pourvu - se rapprochant de la dureté
et de la violence du réel - qu'elle continue à s'en remettre au
récit et aux voix...
On le sait en littérature depuisL'Incessant, et c'est avec fierté qu'on accueille, de
Jacques Ancet, le Silence des chiens (Lien -> http://www.publie.net/tnc/spip.php?article259).
Mais Jacques Ancet c'est aussi une voix ouverte, sans jeu de
mots. Qui s'offre aux grandes et extrêmes explorations de Jean de
la Croix, de Jose Angel Valente, ou en ce moment de Borges, et que
le traducteur doit s'y faire écrivain ou poète comme celui dont il
reçoit les pages.
Alors dialogue ouvert, toute une vie, avec ceux
qui portent la langue dans cet extrême : Bonnefoy, Jaccottet,
Bernard Noël...
Avec le numérique, une nouvelle possibilité de permettre la
circulation de cette réflexion, ouvrant vers ceux qu'elle commente,
nous guidant vers des lectures neuves.
L'autre cohérence de ce très vaste ensemble, deux fois 300
pages, c'est que le premier s'enracine plus dans les voix du passé,
depuis la figure immense et emblématique de Don Quichotte, puis,
via Quevedo ou Saint-Jean de la Croix, jusqu'à Cortazar, Maria
Zambrano ou Claude Simon, tandis que le second suit cette même
exigence découvreuse de l'écriture dans les chemins escarpés du
contemporain, de Valente ou Castaneda vers Jacques Roubaud, Henri
Meschonnic ou Claude Louis-Combet.
Très fier donc, avec une matière aussi lourdement belle, de
contribuer à la présence et la visibilité sur Internet de ceux qui
ont porté la littérature dans ces chemins d'exigence.
Et
Jacques Ancet nous y appelle, nous aide à franchir le rebord...
FB (Lien -> http://www.tierslivre.net)
Les textes ici réunis sont de plusieurs
ordres : des essais, des préfaces à des traductions, et de
simples notes de lecture. Ces notes, j'ai beaucoup hésitéà les
faire figurer dans cet ensemble. Si je me suis décidé c'est que,
malgré leurs limitations évidentes (elles ne portent souvent que
sur un livre et parfois sur des écrivains ou des poètes un peu
oubliés), et à côté d'études plus générales et d'une plus grande
extension, elles témoignent d'un itinéraire de lecteur guidé
surtout par les circonstances et un plaisir ou une émotion que
j'espère pouvoir encore faire partager.
Qu'on ne voie donc là aucun
panorama ou palmarès mais, plutôt, une géographie de préférences
personnelles qui s'étend sur près de quarante ans. Les voix dont il
est question dans le titre viennent d'époques et d'horizons
différents avec, bien sûr, une dominante franco-hispanique où se
confond ma double activité d'écrivain et de traducteur.
Mais pourquoi avoir entrepris ce travail ? Peut-être,
d'abord, afin de mettre de l'ordre là où il n'existe que le
désordre du devenir qui emporte, qui efface tout.
Autrement dit,
pour garder une trace. Avec cet étonnement de voir, au fil du
temps, se dessiner un chemin qui n'existait pas au moment où je le
parcourais. Un chemin ou une cohérence qui tient à un
questionnement insistant déjà au centre d'un précédent recueil
d'essais : qu'en est-il des rapports de l'écriture et du réel- de la littérature et de la vie ? C'est pourquoi ce livre ne
pouvait s'ouvrir que par une réflexion sur Don Quichotte qui est,
sans doute, la tentative la plus profonde jamais menée pour
répondre à cette question.
Et c'est, peut-être ce qui réunit les
auteurs ici présents. Avec aussi le cours d'une existence habitée
par l'amitié de ces voix qui, toutes, ponctuellement ou plus
durablement, m'ont accompagné au long des années. C'est ainsi que,
tout autant que réflexion au sens spéculatif, ces textes le sont au
sens spéculaire du terme : ils réfléchissent une clarté- uneéchappée - qui a souvent éclairé ma lecture et ma vie et dont,
depuis longtemps, je voulais témoigner.
L'ordre choisi n'est, tout simplement, que l'ordre
chronologique, mais l'abondance de la matière m'a conduit à le
scinder en deux grands ensembles qui peuvent être lus séparément ou
dans leur continuité : le premier, Les voix du temps, consacréà des écrivains et poètes dont l'oeuvre est demeurée vivante et
active pour moi, malgré la distance, et qui donc me restent
contemporains : cinq auteurs du xvie, du xviie et du xixe
(Miguel de Cervantès, Jean de la Croix, Francisco de Quevedo,
Stéphane Mallarmé, Arthur Rimbaud) ; cinq auteurs nés à la fin
du xixe siècle et dont la vie et l'oeuvre se sont déroulées pour une
bonne part dans la première moitié du xxe (Miguel de Unamuno, Juan
Ramón Jiménez, Ramón Gómez de la Serna, Pierre Reverdy, Vicente
Huidobro) ; dix auteurs, enfin, nés dans les deux premières
décennies de ce même siècle (Vicente Aleixandre, Luis Cernuda,
María Zambrano, Eugène Guillevic, Yannis Ritsos, Claude Simon,
Julio Cortázar, Jean Malrieu, André Henry, Octavio Paz).
À ces voix venues du temps et de sa profondeur, répond ce temps
où ne cessent de se faire les voix du présent, ce Temps des voix,
deuxième partie où figurent un certain nombre d'auteurs vivants,
dont la naissance s'échelonne, en gros, dans la décennie des années
20 et 30 (d'Yves Bonnefoy à Henri Meschonnic) et 30 et 40 (de
Bernard Vargaftig à Christian Hubin).
D'autres auraient pu figurer
ici, notamment de plus jeunes, mais il fallait se donner des
limites et c'est bien arbitrairement que ce parcours s'achève
finalement avec deux auteurs nés au seuil des années 40.
Jacques Ancet, sept 2009.