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Comme tant d'autres exilés, les républicains espagnols ont quitté leur pays, en 1939, avec l'intention d'y revenir dès sa reconquête. Mais la fin de la Seconde Guerre mondiale ne leur a pas ouvert les portes du retour. Ils ont dû se persuader que la séparation allait durer. Toute une vie peut-être. Apprendre à vivre sans l'Espagne, et sans eux laisser vivre l'Espagne. Certains sont pourtant rentrés, mettant à profit les amnisties proposées par Franco, mais perdant l'estime de leurs compagnons d'exil.
Plus tard d'autres s'en sont tenus à de brefs allers-retours, renouant avec leur famille, leurs paysages, leur enfance. Mais ils ont compris qu'ils ne retrouveraient jamais l'Espagne qu'ils avaient laissée derrière eux, figée comme un arrêt sur image. Une nouvelle génération grandissait, dont la guerre civile n'était plus l'expérience fondatrice. L'exil, c'est peut-être moins la perte d'un territoire que celle du temps : les républicains ont été privés de trente ans de la vie de leur pays.
À la fin, ils ont dû s'avouer que leur véritable Espagne était cette image qu'ils avaient emportée et gardée en exil. Ils ont vieilli en France. Après en avoir rêvé si longtemps, ils ont su que le retour était impossible ; pas même souhaitable, peut-être, maintenant qu'un autre pays vivant les a mêlés à sa chair. Souffrances et consolations intimes, que ce livre excelle à faire découvrir, à l'aide de très nombreux témoignages.