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Une décapitation est atrocement visuelle : la tête, coupée de son corps, exhibe la mort. Tenue par les cheveux, brandie, elle se montre, fascinante, épouvantable. Du corps entier au corps morcelé, tout paraît de l'ordre d'un visible excessif. Cette terrible visibilité, sa teneur spectaculaire, semblerait alors expliquer la prolixité des représentations de décapitations, que ce soit en littérature ou en peinture.
Pourtant, entre le corps entier et le corps morcelé, l'instant du trépas, c'est-à-dire la décapitation en elle-même, est imperceptible. Si la mort par décapitation se perçoit, s'exhibe même, le mourir arrive trop rapidement pour être perçu : l'excessive visibilité est perturbée par un instant qui, lui, ne se voit pas. Ce paradoxe se trouve inscrit dans les ouvres, où une ellipse récurrente absente l'instant, laissant seuls le moment précédant juste la décapitation, la victime tendant le cou, et celui lui succédant, la tête décollée.
L'imperceptible laisse alors place à l'imaginaire : dans l'instant qui ne se laisse voir, se logerait un entre-deux, le passage entre la vie et la mort. Un doute s'imagine, un mystère se déploie, aussi bien dans la peinture religieuse renaissante, dans les peintures d'histoire du XVIIe siècle que dans la littérature post-révolutionnaire, où, à chaque fois, l'instant ne peut que manquer. Ce n'est donc pas tant à la visibilité qu'à l'irreprésentable de la décapitation que se confrontent les représentations.