En cours de chargement...
Dans ce livre, le premier à être consacré à une analyse d'ensemble de Maus, A Survivor's Tale, Pierre Alban Delannoy propose d'interroger la pertinence de la bande dessinée à traiter d'un sujet aussi grave que celui de la Shoah. Une phrase, prononcée par Art Spiegelman à la page 16 du second tome, révèle la nature exacte de son œuvre : " Je sais que c'est dément, mais d'une certaine manière je voudrais avoir été à Auschwitz avec mes parents ".
MAUS est cette tentative insensée : la descente aux enfers d'un fils de survivants qui cherche à s'approprier symboliquement une place au sein de sa famille en des lieux et des temps où elle fut durement éprouvée par le Génocide. Puisque ces lieux, ces temps et ces personnes sont désormais inaccessibles, Spiegelman tente de s'en approcher par les images mentales et dessinées que suscite le témoignage de son père, dont il est à la fois l'initiateur et le destinataire privilégié et qu'il restitue, d'un même mouvement, en substance et dans ses conditions d'énonciation.
En nouant étroitement le témoignage de Vladek et l'autobiographie de son fils, MAUS se présente comme un étrange véhicule qui permet à son auteur de faire passer le passé dans le présent, pour affronter ensemble la réalité d'Auschwitz et les traumatismes que celle-ci a provoqués chez lui. Or, c'est précisément parce que la bande dessinée rend possibles des articulations spatio-temporelles extrêmement complexes (qu'elle est peut-être la seule à permettre) qu'elle est le médium le mieux adapté à cette entreprise.
Mots-clés : Shoah, bande dessinée, autobiographie, témoignage, réception, sémiotique de l'image.