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L'historienne Annette Wieviorka, spécialiste émérite de la Shoah, est, en 1970, une jeune militante maoïste. Dans l'enthousiasme de Mai 1968 et de la Révolution culturelle, les intellectuels français sont pris de passion pour la Chine communiste (dont Philippe Sollers, Julia Kristeva ou Roland Barthes, qui en rapportent des écrits fortement empreints d'idéologie). Avec son mari et son petit garçon, Annette Wieviorka s'installe pour deux ans à Canton comme professeure de français.
Dans le « laboratoire de l'homme nouveau », ils s'attendent à apprendre du réveil des masses et du modèle démocratique chinois. À la place, ils découvrent la pauvreté des Chinois et le vert des rizières, la surveillance constante, la soif de camaraderie mêlée à l'isolement dans une société collective. Dans ce récit où se croisent la fraîcheur de notes prises sur le vif et le regard rétrospectif de l'historienne, les rencontres, les paysages et les questions se succèdent au son des chants révolutionnaires et de l'opéra chinois.
Devant « l'impossibilité de saisir autre chose que la surface de la société chinoise », quel sens donner à ce qui est vécu ? De ces années chinoises se dégage une « passion douloureuse, passion louche, passion déchirante » pour un pays, une époque et des idéaux.
Un témoignage limité
Les témoignages des occidentaux présents en Chine à cette époque sont limités. En effet il leur étaient impossible en dehors du contexte officiel, d'avoir des relations avec des chinois. Difficile de se lier d'amitié et encore plus d'être reçu dans une famille. Il en est toute autre chose de Jean Tuan, fils d'immigré chinois installé en France dès 1929. L'excellent « Un siècle chinois » (Edition C.L.C), qui sortira au printemps 2021, nous plonge dans l'histoire de la communauté chinoise vivant en France dans la seconde moitié du XXème siècle. Et surtout, l'auteur nous rapporte son incroyable séjour à Pékin durant l'été 1967 alors que le pays est plongé en pleine révolution culturelle. Séjour vécu au plus près des chinois, en vivant avec eux. Il sera même « garde rouge honorifique », certainement un des rares occidentaux à l'avoir été… Ensuite Jean Tuan nous fait vivre la spectaculaire évolution du pays de 1980 à 2000 dont il a été un témoin privilégié grâce encore une fois à ses origines. Marie Holzman, sinologue de renom, a préfacé cet ouvrage, reconnaissant son caractère unique.