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Celui que Bernanos appelait « le plus grand peut-être de nos écrivains vivants », a déjà donné lieu à une abondante littérature et on hésite si, à travers tant d'exégèses, tant d'interprétations, Montherlant cherche plus à se découvrir ou à s'expliquer. Il ne ressemble à aucun autre ; il ne sort ni de l'Université, ni du monde des affaires, ni de l'administration, ni de la diplomatie ; il n'occupe aucune fonction dans l'édition, dans la critique, dans les jurys littéraires, dans les organisations culturelles ou professionnelles, nationales ou internationales, non plus que dans les professions libérales.
Enfin, il prend la littérature au sérieux, considérant que l'écrivain, par cela même qu'il écrit, assume une responsabilité morale dans la cité, et que son devoir premier est d'en prendre conscience. C'est à ce trait, sans doute, que se référait Aragon en écrivant : « J'ai le plus grand respect des hommes qui représentent vraiment la France ; et, dans la littérature, je compte parmi eux Henry de Montherlant.
On n'est pas plus Français que lui. »
Au moment où « Fils de personne » reparaît à la scène, et ou les « Essais » entrent dans la bibliothèque de la Pléiade, « Montherlant ou l'homme encombré de Dieu » s'efforce de découvrir, dans la pensée de l'écrivain, dans son ouvre, dans sa manière d'être, les bases et les raisons d'une exigence morale, presque sans équivalent dans la littérature française d'aujourd'hui.
L'étude en est conduite avec une vigilance et une information, qui font de ce livre un ouvrage tout à fait à part, une manière de somme ou, si l'on veut, une thèse sur un phénomène d'une extrême rareté et de la plus grande conséquence : un écrivain pur.
L'auteur s'est pourtant interdit d'interroger autre chose que l'ouvre même, et l'a étudiée, en quelque sorte, comme s'il s'agissait d'un écrivain mort - à la différence près, justement, que Montherlant est bien vivant, et surgit en personne pour réagir avec vivacité à certaines idées de l'auteur.
Il s'en faut que les deux voix soient toujours d'accord, on le verra, et c'est ce qui donne à ce portrait-dialogue son intérêt exceptionnel.
Une abondante illustration, inédite en librairie, permet au lecteur de restituer au dialogue l'allure concrète et familière d'une rencontre. On verra que Montherlant justifie le mot d'André Gide : « C'est un seigneur des lettres ».