Pour un nouveau contrat de solidarité

Aujourd'hui, la crise économique accentue la fracture qui menace l'équilibre des rapports entre les sociétés et à l'intérieur des sociétés. Rapports entre les pays de l'Hémisphère Nord et ceux de l'Hémisphère Sud, entre le centre et la périphérie. L'érosion sociale n'épargne pas le centre : il y a, d'une part, les privilégiés et, d'autre part, les exclus de la croissance économique. Dans la périphérie, des îlots de prospérité sont ceinturés par des "océans de misère", par des hordes de déshérités.
Scandale pour la conscience contemporaine, ces inégalités ont provoqué depuis quelques années des réflexions importantes et des réformes politiques plus ou moins significatives. Il faut un nouveau contrat social afin d'éviter l'implosion de la société. C'est dans cette ambiance générale de malaise social que nous voulons lire l'ouvrage capital de John Rawls. Ce projet de lecture est double : d'une part montrer comment la théorie rawlsienne de la justice s'inscrit dans la tradition philosophique du contrat social et d'autre part infléchir cette théorie rawlsienne de la justice dans le sens de la modernité politique africaine.
Plus concrètement, la notion de position originelle peut aider à comprendre la visée des Conférences Nationales Souveraines Africaines en tant que lieux de fondation d'une communauté politique. La justice comme équité permet de s'atteler à l'invention d'un nouvel ordre social fondé sur la coopération des partenaires sociaux. Le consensus par recoupement oblige à rechercher, dans le vivier existentiel des Négro-Africains, un fonds commun qui porte les divergences d'intérêts et assure la stabilité des institutions.