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S'assujettir à l'Autre en se plaçant constamment dans une position soit de victime, soit de subordonne : telle est l'étrange disposition collective des Paumari, peuple autochtone de l'Amazonie brésilienne. A l'encontre de l'ethos de la prédation (par le raid, la guerre, la capture de biens et de personnes) qui prévaut parmi les sociétés amérindiennes de la région, les Paumari affichent et pratiquent ostensiblement une "culture" de la soumission, tant dans leurs rapports avec les autres groupes humains qu'avec les non-humains et les entités invisibles.
Leur mythologie, leurs rituels du cycle de vie, leurs activités économiques, tout converge pour faire d'eux des proies, tributaires d'Autres qui occupent de façon systématique la position de prédateur, de patron, de familiarisateur. Il n'est pas jusqu'aux relations de parente internes à la communauté qui soient empreintes de cette logique relationnelle. Au gré de la première ethnographie jamais réalisée d'une population dont l'attitude prend à contre-pied tous les attendus de l'anthropologie américaniste, Oiara Bonilla s'attache à rendre intelligibles ces si déroutants Paumari.
Si déroutants, de fait, qu'à force de mettre en oeuvre leur politique de sujétion volontaire doublée d'une présentation misérabiliste de soi, ces virtuoses de la dépendance s'imposeraient finalement presque en maîtres du jeu.