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Alors que le " vieux territoire " des études littéraires est soumis aux menaces du déclin et à des procès en inutilité, qu'il n'est plus guère arpenté que par quelques irréductibles, Franco Moretti semble bien décidé à en transformer la topographie à grands coups de graphes, de cartes et d'arbres. Soit les outils sauvages de l'objectivation scientifique pour un dynamitage en règle : les graphes de l'histoire quantitative, les cartes de la géographie et les arbres de la théorie de l'évolution.
Les premiers substituent au canon autour duquel tourne l'histoire littéraire depuis deux cents ans la totalité de la littérature mondiale (aussi bien japonaise que française ou nigériane). Les secondes donnent à voir les rapports réels et imaginaires que la littérature entretient avec son contexte historico-spatial. Les troisièmes osent une théorie de l'évolution des genres littéraires influencée par Darwin et la biologie contemporaine.
Cette " lecture à distance " démontre à quel point l'histoire littéraire n'est pas nécessairement celle que l'on croyait : la connaissance des mécanismes de survie littéraire permet d'interroger les limites de notre curiosité pour les livres, de notre horizon culturel et de nos représentations du monde. De quoi lutter, en somme, contre l'appauvrissement des manières de dire le monde aujourd'hui.