Il ne l'a jamais évoquée. Pourtant, il lui a écrit des poèmes, a imaginé des voyages officiels pour l'emmener au bout du monde sans risquer de se faire pincer. Il est même allé jusqu'à louer un appartement pour l'abriter, elle et surtout leur histoire. Jacques Chirac a connu de nombreuses femmes mais c'est la seule dont il est tombé amoureux, celle pour laquelle il a failli tout abandonner. De 1974 à 1976, Jacqueline Chabridon, journaliste, issue d'un milieu populaire où l'on s'agenouillait davantage devant la photo de Trotski que devant celle du Général, a partagé avec Chirac ses difficiles années de Premier ministre de Giscard.
Pendant que le fringant chef de gouvernement se bat à l'Assemblée pour obtenir le vote de la loi sur l'IVG, ou que sa réflexion sur la peine de mort évolue, elle, la fille de communistes, ex-épouse du fidèle ami de Mitterrand Charles Hernu, se tient dans l'ombre, retrouvant Chirac à la nuit tombée. L'a-t-elle influencé, le poussant à adopter des positions « de gauche » ? C'est ce qu'on craint à l'époque chez ceux qui gravitent dans l'entourage politique de Chirac.
Pire encore à leurs yeux, a-t-il envisagé de divorcer pour elle ? Dans la société française encore très corsetée des années 70, bien que la presse mette un point d'honneur à passer sous silence une histoire dont les journalistes sont pourtant les premiers témoins, tous estiment qu'un tel choix compromettrait son destin présidentiel. Bernadette Chirac, son épouse, et Marie-France Garaud, sa redoutable conseillère politique, ont en tout cas pris la menace au sérieux.
Toutes ces circonstances font de cette relation un épisode central de la vie de Jacques Chirac qui interroge son rapport à la politique et jette un éclairage nouveau sur le parcours et la personnalité mystérieuses de celui qui fut élu deux fois président de la République.