Le mélomane est un jouisseur. Il ne connaît pas l'absence d'inspiration du compositeur, ses incertitudes, ses tourments alimentés par le désir d'originalité...
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Le mélomane est un jouisseur. Il ne connaît pas l'absence d'inspiration du compositeur, ses incertitudes, ses tourments alimentés par le désir d'originalité ou de perfection, ni la difficulté du critique musical obligé à la première audition d'énoncer un jugement définitif. Il se laisse conduire par ses émotions, son trouble, son enthousiasme ou ses réticences. Il passe en revue toute la gamme du plaisir et du déplaisir. Or pour le jouisseur, tout plaisir contrarié réveille l'interrogation. S'il est capable d'établir une échelle des valeurs des musiques du passé, de distinguer la part de la nouveauté dans le renouvellement d'un art savant, il lui est difficile d'émettre plus qu'une opinion sur des œuvres refusant des lois établies depuis des siècles. Il est vrai que les écrits théoriques actuels d'ailleurs passionnants, justifiant ces nouveaux langages, ne manquent pas, mais le pauvre mélomane ne peut, en dernier lieu, s'appuyer que sur son Oreille. Aussi le Journal, cette forme libre où les affirmations et les négations se font et se défont au jour le jour, peut naturellement illustrer cette quête incertaine de la vérité.