En cours de chargement...
Dans l'Antiquité tardive, malgré une diffusion relativement importante, le manuel cartographique de Ptolémée (IIe s. après J.-C.) n'eut pas de postérité conforme au projet de son auteur. Dans le Moyen Age latin, en revanche, la connaissance de son contenu ne disparut jamais, grâce en particulier aux traités d'astronomie traduits de l'arabe. La version latine faite au début du XVe siècle n'eut donc pas le caractère révolutionnaire qu'on lui attribue souvent.
La réception " philologique " d'une somme qui permettait de comprendre l'espace antique tel qu'il apparaissait dans les classiques fut importante. Mais les savants formés dans les universités, astrologue et médecins, jouèrent un rôle jusqu'à présent peu étudié dans l'analyse des contradictions entre l'image du monde ptoléméenne et d'autres types de représentations qui ne furent pas pour autant dépréciés et abandonnés.
Le long processus de modernisation de Ptolémée entra dans une phase décisive à partir du troisième quart du XVe siècle grâce à la synthèse opérée entre programme humaniste et philosophie naturelle. Il se poursuivit dans le premier tiers du xvie siècle par la réflexion sur les modes de représentation (appelés " projections " de façon anachronique), sans qu'ait encore été abolie la dépendance du monde sublunaire à l'égard du monde céleste, caractéristique de la pensée de l'espace terrestre depuis l'Antiquité, que l'oeuvre de Ptolémée justifiait au mieux.
La réception de la Géographie, envisagée sur une longue période, ne vérifie donc pas l'opinion selon laquelle elle aurait joué un rôle fondamental dans le passage supposé à une conception " moderne " distincte de la conception " médiévale " de l'espace. L'ouvrage, qui remet en question un certain nombre de lieux communs de l'histoire culturelle, est fondé sur l'analyse de première main des sources textuelles et cartographiques de la tradition grecque et latine émanant de milieux intellectuels très divers.
Patrick Gautier Dalché est directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique (IRHT) et directeur d'études à l'Ecole Pratique des Hautes Etudes, Section des sciences historiques et philologiques (Sorbonne).