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L'étude des philosophes latino-américains en Amérique latine s'est divisée selon deux orientations principales : ou ils étaient dévalorisés parce que l'on considérait qu'ils ne faisaient que reprendre la pensée européenne, ou bien on a tenté de les sauver à partir de perspectives étrangères à la philosophie. Il n'existe pas, dans la majorité des cas, d'interprétation sérieuse de leurs oeuvres, ni de la création conceptuelle qui a pu se dégager de celles-ci.
Pour cette raison, Roberto Luquín s'interroge sur le sens que peut avoir une recherche sérieuse sur la pensée spéculative d'un philosophe latino-américain. En réalité, à contre-courant des lectures hégémoniques, Roberto Luquín dévoile dans ce livre l'important effort de construction conceptuelle de José Vasconcelos, tout d'abord pour se libérer du joug intellectuel positiviste, et ensuite, pour configurer une philosophie esthétique.
Par conséquent, au-delà des déficiences présentes dans toute oeuvre, l'auteur soutient que le vasconcélisme est une authentique pensée philosophique. En effet, il ne s'agit pas de la répétition érudite de la pensée européenne, mais bien de l'usage de la capacité réflexive pour penser par soi-même, pour édifier sa propre philosophie et résoudre ses propres problèmes. Il s'agit d'un geste constructif et créateur qui a su faire le lien entre la pensée philosophique et la pratique politique.
Ainsi, son étude non seulement a du sens comme pensée théorique et pratique, mais aussi comme questionnement sur l'interprétation du passé philosophique latino-américain. La recherche nous invite à repenser l'histoire et à nous demander si ce n'est pas l'esprit du ressentiment qui a conduit l'historiographie philosophique latino-américaine à penser comme elle l'a fait jusqu'à maintenant. Pour Roberto Luquín, l'image que cette historiographie a construite de son activité philosophique a provoqué, dans une certaine mesure, son auto-annulation.