Le narrateur ignorait qu'en passant devant cette boutique de disques de collection, sa vie changerait. Une femme le contemplait depuis la vitrine, le regard plongeant et la coiffure mousseuse d'avant-guerre. C'était écrit en grand : elle se nommait Elena Oswald. L'homme entra pour écouter quelques enregistrements de cette artiste. Ce nom, il l'avait entendu plus d'une fois, mais avec ces chansons, c'était toute la Mitteleuropa d'avant 1933 qui lui parvenait.
Une voix entre celle de Marlene Dietrich et celle de Zarah Leander, une voix à faire rêver. Elena remplissait les salles de Vienne, Leipzig, Berlin avant que le nazisme ne la contraigne à émigrer en France où elle redevint une vedette sur scène et à l'écran. Puis vint la défaite de 1940, l'exode, et il n'y eut plus de nouvelles d'elle. Un demi-siècle plus tard, le narrateur tombe à son tour sous le charme.
Pour lui, par lui, Elena reprend vie. Il part à sa recherche. Commence alors un jeu de piste qui le conduit de Paris à Lisbonne, de Lisbonne à Dresde et de Berlin à New York. Amants, ennemis, agents secrets, résistants, musiciens, le narrateur rencontre tous ceux qui ont pu croiser Elena sur les chemins de l'exil. En suivant les pas de son héroïne, il redécouvre aussi le Lisbonne de la Seconde Guerre mondiale, port neutre comme Casablanca.
Dans cette ville où se mêlaient réfugiés juifs, antinazis mais aussi sympathisants de Vichy, les trafics et les compromissions n'empêchaient pas le courage et l'idéalisme d'exister, la douleur le disputait à l'espoir et la création artistique tentait de se maintenir envers et contre tout. Un portrait de femme, ultime et bouleversant, qui a pour toile de fond la guerre, l'exil, le courage et surtout l'espoir.