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Le chagrin d’amour naît de multiples causes, mais fait toujours irruption comme une condamnation sans appel, une sorte de mort. Certains, comme Werther, n’y survivent pas. D’autres le traversent, taciturne ou ressassant leur plainte, seul ou entouré. Tous cependant font figure de héros, au sens originel du mot, dans la mesure où ils se confrontent au plus profond des cataclysmes : la perte d’amour.
Surmonter ce désastre, c’est faire un pas de plus dans la condition humaine, c’est, tel Orphée, revenir des enfers en laissant l’être aimé derrière soi. C’est aussi, nous dit Patrick Avrane, s’ouvrir à une connaissance de soi. Car, dans l’amour, il y a toujours une part de tromperie. On aime dans l’autre une image idéalisée, miroir de nos désirs - l’amour rend aveugle, dit-on. Dès lors, le chagrin décille.
Il peut même nous révéler une vérité essentielle : cette faille en chacun qui fait qu’on n’est jamais tout pour l’autre. Et alors nous initier à une nécessité vitale : la capacité à être seul. Ainsi le chagrin d’amour est-il un des premiers pas vers l’âge adulte, une expérience de rupture : c’est Juliette s’opposant à sa famille pour aimer Roméo, jusqu’à la mort. Nourri aux chagrins amoureux de la littérature (Werther, Tristan et Yseut, Phèdre, ou même Amable, le boulanger de Pagnol) autant qu’à des expériences racontées au psychanalyste, ce livre nous montre aussi que la perte d’un être aimé ne peut être recouverte, le chagrin, lui, se traverse.