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Né en 1935 dans un hameau ancestral d'une petite île du Japon encore couverte de forêts, Kenzaburô Ôé appartient à la génération qui subit de plein fouet la capitulation de son pays au terme de la Seconde Guerre mondiale. Quittant son île natale, il s'installe à Tokyo, petit provincial égaré à l'accent incompréhensible, pour étudier la littérature française. Et déjà, il donne ses premiers écrits. Son parcours personnel singulier est indissociable d'une oeuvre d'une ampleur et d'une variété saisissantes où peuvent se lire en filigrane tous les combats, les défis et les contradictions qui ont émaillé l'histoire du Japon, des bombardements atomiques à la catastrophe de Fukushima.
La violente formation nationaliste endurée à l'école, qui dès l'enfance a préparé Ôé à mourir en héros au combat, sacrifié à un empereur divinisé, la mort de son père durant les derniers mois de la guerre, le drame de Hiroshima, la naissance de son fils gravement handicapé sont autant de situations traumatisantes qui nourrissent son oeuvre. Il transforme sa propre souffrance en expression de la condition humaine, et s'engage en faveur des minorités, des faibles, de ceux qui cherchent le salut dans un monde absurde, s'opposant au Pouvoir et surtout à l'Atome.
Depuis la catastrophe de Fukushima en 2011, il apparaît plus que jamais comme une conscience mondiale, un défenseur de la Nature en perdition. Le prix Nobel de littérature lui a été décerné en 1994.