En cours de chargement...
Tracer une ligne, puis d'autres, ouvrir chaque mot comme on le fait d'une bogue... Le poème n'existe pas a priori. Pas plus qu'il n'existe pour soi seul, maillon d'une relation à l'Autre par-delà le temps et l'espace. Chaque mot, chaque sonorité ; témoignent d'une part de sa vérité. "Les mots sont-ils porteurs de plus que nous ? " se demande Yves Bonnefoy. Qu'ils se chargent de tendresse ou de dureté, ils n'en requièrent pas moins un temps de décantation, une attente.
Comme lorsqu'il a plu et que l'eau des flaques demeure trouble, avant de retrouver sa transparence. L'enfant ne se pose pas ces questions. Il prend de la terre dans ses mains, la pétrit. Sans même penser à ce qu'il pourrait en faire — est-ce qu'il en fera quelque chose ? A sa façon on a tenté un geste. Pour retenir le temps — qui sait ? , l'éclairer. Quelque chose a pris forme, on le voudrait, qui tient à la fois de l'inquiétude et de ce que l'on reçoit du monde dans l'instant.
Un geste d'herbe, un éclat de rouille... Comme si tout ce qui est était appelé à nourrir le poème. Le poème du monde, qui reste toujours à venir, pour peu qu'on lui garde notre confiance. Dans le rythme et le balancement, le remuement, la virevolte ; dans l'allure. Si peu de chose et tellement à la fois, qu'on se prend à rêver une fois encore d'une parole qui nous mette en chemin.