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Le détournement : ce geste d'appropriation, entre citation, plagiat et pastiche, peut être irrévérencieux, outrancier, vorace ou subversif ; le résultat, lui, sera tour à tour comique ou inquiétant, mais - à condition d'être remarqué - toujours désorientant. Qu'il désigne un rapt, une reprise frauduleuse, une atteinte au bon goût ou un acte terroriste, le détournement s'inscrit dans l'histoire de plusieurs avant-gardes.
Si c'est aux abords de 1960 que s'accroît l'intérêt pour ses formes et ses représentations, au moment où les situationnistes l'établissent en tant qu'opération stratégique et l'ouvrent résolument à sa dimension sociopolitique, l'histoire du détournement est plus ancienne et il reste aujourd'hui difficile de nier son importance dans de très nombreuses interventions littéraires modernes et contemporaines.
L'étude du phénomène, investie par les historiens de l'art, a pourtant été quelque peu délaissée par la critique littéraire. Et si la pratique du détournement touche plusieurs littératures et convoque autant de disciplines, puisque par nature elle trouble et transgresse les frontières, son importance dans le domaine français aux XXe et XXIe siècles demeurait jusqu'ici trop peu explorée. Au fil des études rassemblées dans le présent ouvrage, le lecteur verra se dessiner l'histoire et l'évolution de cette pratique, de Dada à l'extrême contemporain, à travers une multiplicité de figures, certaines déjà fort connues (Tzara, Breton, Éluard, Péret, Cocteau, Michaux, Perec, Debord, Deguy), d'autres moins, qui restent encore à découvrir (Cadiot, Alferi, Novarina, Bouchard, Game, Moussempès et Boyer).