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"Les saintes de Zurbarán, ces femmes parées, presque fardées, qui acceptaient extatiques la violence des bourreaux, je les avais aimées, et j'avais désormais envie de lacérer leur image, leur visage si lisse et si tendre. Désormais j'avais soif de suppliciés, de brûlés vifs, de langues coupées, de jambes brisées, de membres détachés et semés aux quatre vents. Quel mérite y avait-il à affronter le mal si tout était désincarné ? Dans l'horreur qui nous avait saisis le 11 mars, nous avions hurlé, pleuré, tremblé, supplié et gémi.
Depuis Atocha, j'avais le sentiment que personne ne pourrait plus jamais rien pour moi". 11 mars 2004 : attentats dans quatre trains de la banlieue de Madrid. Restauratrice de tableaux, Alice sort indemne mais choquée de la catastrophe qui fait près de 200 morts et des milliers de blessés. Après le drame, elle n'est plus la même : elle qui aimait tant raviver la beauté des toiles de Zurbarán trouve désormais son travail dérisoire.
Même sa relation amoureuse avec Angel, chef-cuisinier venu de Colombie, est remise en cause. Loin des siens, seule avec sa blessure intime, elle vit les affres de la culpabilité des "survivants" : elle doit rentrer en France. Mais comment faire quand on est incapable de sortir, incapable de prendre un avion ou un train ? Sobre et sensible, Sarah Manigne cerne au plus près le malaise d'une victime et questionne la représentation picturale de la douleur.
Jusqu'à quel point l'art console-t-il ?
Un livre sur les attentats de Madrid
Alice est une française restauratrice de tableaux qui travaille pour le musée del Prado à Madrid. Son quotidien est chamboulé après avoir été dans le métro lors des attentats du 11 mars 2004. Passionnée par le peintre Zurbaran, elle n'arrive plus à travailler et doute même de son couple. Le malaise éprouvé par les victimes est très bien décrit ainsi que le fait de se reconstruire après un tel drame. Le tout agrémenté de belles descriptions de tableaux.