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Avec René Moreu, on marche dans le ciel et on découvre l'infini dans un jardin. La peinture est pour lui la vie magnifiée, la vie végétale surtout, la moins humaine, avec laquelle il entre en osmose, lui laissant la place : "Je me suis enfoui dans le profond d'un jardin jonché de réminiscences." La nature d'abord fut pour lui salvatrice, après qu'à vingt-trois ans la survenue d'une demi-cécité fut venue brutalement bouleverser son travail et sa vie : "Les miroirs se sont brisés." Cela le conduisit à s'abandonner à la singulière alchimie qui lui fait toucher les choses comme de l'intérieur de l'oeil.
Il en naît un "approfondissement étrange", une vision seconde, chamanique, aimantée à la lumière comme les racines se guident à la présence de l'eau. René Moreu entre alors dans une nuit transfigurante, au bord d'un précipice qui est autant celui des ténèbres où naît un art de source profonde que la nuit des humiliés où il rejoint et salue Séraphine de Senlis. Son oeil nu ignore la perspective comme les conventions des esthétiques.
Il pénètre dans la solitude des choses, leur lumière : " Les végétaux me révèlent des formes inconnues et mystérieuses, des écritures magiques, d'étranges floraisons. Je regarde les plantes comme le musicien écoute les oiseaux. Je tente de suivre les méandres, les chemins embrouillés des croissances végétales, d'incroyables dentelles." "Je ne sais plus où donner de la vie", disait encore il y a peu ce grand peintre disparu le 16 mai dernier, en cette année qui aurait marqué son centenaire.
Son oeuvre pourtant est encore en devenir. Ce livre s'appuie sur la longue chaîne de ceux qui furent éblouis par la rencontre avec Moreu. Il ouvre grand les portes d'un univers de sensations et de libertés inconnues.