Les petits regardaient leur père, les yeux écarquillés, ceux d'Angèle brillaient, les aînés écoutaient, ils ne perdaient aucune des paroles d'Adrien. Lui, Léon, scrutait son visage. D'une voix grave, sourde, les traits creusés, le regard brûlant, Adrien évoquait les bâtiments, l'atelier, les machines, mais il s'agissait d'une ambition beaucoup plus vaste. Il n'était plus le même homme, le séducteur, l'amateur de bons vins, il était Adrien, porteur d'un rêve qu'il avait su partager avec Angèle... A travers les figures de ses père et grand-père, Geneviève Metge retrace la création, l'épanouissement et le déclin d'une fabrique de soies lyonnaises, la tragédie de la guerre, les conséquences traumatiques de la disparition d'un fils aîné en 1914, à vingt et un ans... Retournant sur les lieux de son enfance, l'auteure narratrice, petite-fille d'Adrien, fait revivre, dans le claquement des métiers à tisser, l'esprit bâtisseur de son grand-père, les choix de son père, le travail des femmes. De la fin du XIXe siècle à aujourd'hui, elle interroge le destin des siens et dessine " un chemin troué ". A la fois chronique familiale et restitution d'une époque : un témoignage sobre, pudique et émouvant.