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"Je suis au chevet de ma mère. J'attends sa mort. Je ne l'appréhende pas, non, je l'attends. Je l'attends avec impatience, avec rage ! Voilà des heures qu'elle gît là, livide, les yeux clos. Dort-elle ? Est-elle morte ? Fait-elle semblant ? Elle en serait bien capable. A vrai dire, je n'en sais rien. Ma mère a toujours été difficile à cerner. A onze heures du matin, comme chaque jour depuis mon arrivée, j'ai tiré les rideaux.
Moins de lumière, geint-elle. Toujours à se plaindre. Jusqu'à son dernier souffle. Certes, il peut s'agir d'une gêne. Sans doute l'éclat du soleil lui brûle-t-il les yeux, chose logique à l'article de la mort, d'autant que depuis ces dernières années elle s'est mise à collectionner les lunettes de soleil, énormes, bombées devant, larges sur les côtés, qui lui donnent l'air d'une mouche ou d'un motocycliste.
A quelle profondeur a-t-elle plongé ? Au fin fond des abysses, ou va-t-elle remonter brusquement à la surface comme le cadavre de Paul Meurisse dans la baignoire des Diaboliques, ses yeux écarquillés, pour me terroriser ? J'ai sorti mon petit miroir, je l'ai approché de ses lèvres. Un, deux, trois... Rien... A quatre, il s'est embué".