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Le propos de cet ouvrage est d'examiner les différentes manières dont le thème animal - c'est à dire aussi bien les animaux dans l'individualité de leurs espèces que la notion diffuse d'animalité - a pu être utilisé - réellement, symboliquement, idéologiquement, philosophiquement - dans l'argumentaire des pouvoirs et des pratiques et discours qui les soutiennent ou les interrogent. Déjà, les rois antiques sont de leurs chasses les emblèmes redoutables de leurs capacités de conducteurs d'hommes, les bêtes domestiques fournissant pour leur part de parfaits modèles d'obéissance.
Après les bestiaires fantastiques du Moyen Age et la rupture de la Renaissance, les temps modernes modifient la donne en faisant passer l'animalité devant l'animal et ses figures. Perdant l'évidence à la fois de son ancestrale sociabilité et de son essentielle rationalité, l'animal humain se révèle, avec Machiavel, Hobbes, Rousseau puis Nietzsche, Freud et les contemporains, de plus en plus rétif, se révélant d'une sauvagerie au fond définitivement irréductible.
Alors, l'animalité reflue des animaux vers l'homme et tend ) constituer une naturalité problématisant profondément le politique et l'idée de droit naturel. Les XVIIIe et XIXe siècles, et enfin les sciences humaines, l'ethnologie, la sociobiologie, l'émergence de biotechnologie et de biopouvoirs, prolongent et amplifient cette dimension animale tout en la chargeant d'une complexité nouvelle et parfois inattendue.
Ainsi, loin de réduire de simples stratégies d'instrumentalisation, les usages politiques de l'animalité comportent une dimension d'interrogation critique prenant à partie l'ensemble de la pensée politique.